* Leur petite marche dans le froid avait été bien agréable, et Ruika regretta presque lorsqu’ils poussèrent la lourde porte du dortoir, pour s’échouer dans un monde bouillant. Ce bref contact avec la température extérieure fit cependant tout de même battre son cœur, assez fort pour qu’elle retrouve l’euphorie habituelle de l’hiver. Elle suivit Noah dans le long couloir, sans fenêtres, qui menaient aux chambres. En passant devant la chambre 39, elle eut un bref regard vers la porte, qu’elle détourna bien vite. Ils finirent enfin par arriver devant sa chambre, et, en parfait gentleman, Noah poussa la porte pour la laisser entrer.
Elle avait un peu honte, de montrer sa chambre, comme ça, à un inconnu. Il y avait un grand placard, dans lequel elle rangeait ses affaires. Et trois lits. Deux lits superposés d’un côté de la chambre, et un lit simple de l’autre côté. Comme elle était seule dans cette chambre, elle avait choisi le seul lit qui était en hauteur, juste à côté de la fenêtre. Ainsi, au réveil, elle pouvait rester dans son lit, à paresser, et regarder la cour encore sombre. C’est d’ailleurs à ça qu’elle occupait ses longues nuits d’insomnie, lorsqu’elle n’avait pas la force d’aller se promener dans le parc. Le soir, elle aimait allumer la petit lampe qui était accrochée à son lit, et écrire, ou dessiner, jusqu’à ce qu’elle en oublie la fatigue, et n’arrive même plus à dormir. Et puis, elle finissait par s’allonger tout de même, et se réveillait, au bout d’une heure, pour regarder la cour, et relire tout ses textes qu’elle avait déjà oubliés. Et des fois, elle allait sur le lit simple, à l’autre bout de la pièce. De façon à ne pas voir l’extérieur, et elle s’asseyait, contre le mur, se recroquevillait pour prendre le moins de place possible. Elle serrait ses genoux contre elle, jusqu’à exploser sa poitrine. Mais elle ne pleurait pas. Elle ne pleurait plus. Cette chambre était déjà pleine de ses habitudes. Ça la changerait d’avoir quelqu’un avec elle. Mais peut-être que ça lui ferait retrouver une vie à peu près normal. Parce qu’elle en avait besoin. Myril aurait voulu qu’elle vive normalement, elle en était sûre.
Mis à part tous les souvenirs qui y étaient nés, la chambre n’avait rien de personnel. Pas un seul poster, pas une seule photo. On pouvait même douter du fait que quelqu’un vive ici, si l’on jetait un coup d’œil rapide. Seul le lecteur mp3, abandonné sur sa table de nuit, laissait penser que quelqu’un d’autre que le silence vivait ici.
Une fois entrée, elle se retourna vers Noah, et lui adressa un sourire. *
_ Voilà, c’est ça. Ça te plaît ?
* Elle espérait qu’il ne serait pas trop déçu. Ça n’est pas forcément à cela que l’on s’attend, lorsque l’on est invité à partager la chambre d’une fille. *