Pfouuu, quelle journée. Tout le monde courait partout, se bousculant parfois à cause de la foule qui avait envahi les lieux pour l'occasion. Parents, frères et sœurs, amis, voisins... Tous les prétextes étaient bons pour ceux qui n'avaient rien à faire de la journée et qui n'habitaient pas trop loin. Et même pour les autres d'ailleurs. C'est ainsi que Koharu avait eu la surprise de trouver ses parents entre deux masses d'inconnus le matin même. Ils avaient pris une demi-journée pour assister à l'événement. Légèrement mal à l'aise face à cette situation, avec l'impression de faire le grand écart entre deux mondes qui n'avaient d'ordinaire aucun lien, la jeune fille avait aimablement présenté ses amies à ses parents, et vice-versa. Elle s'était excusée, avait abandonné les filles du club d'athlétisme pour bavarder un moment avec ses parents. Les habituelles questions avaient commencées à tomber... Oui elle allait bien. Non, les cours n'étaient pas trop difficiles, et ses résultats pas en nette baisse. Oui, la nourriture était bonne, non elle n'était pas trop grasse. Oui ses amies étaient sympathiques, bien sous tous rapports et leurs notes étaient honorables. Non, elle n'avait pas fait honte à la famille en se comportant étrangement, et non, elle n'avait toujours pas oublié les bonnes manières, ni la façon de se tenir en public... Elle demanda quelques nouvelles de son petit frère, puis fit jouer ses activités au sein du club pour s'échapper de l'emprise familiale. Pffou. Ben quoi ? Il fallait bien que ce club serve à quelque chose, non ?

En l’occurrence, ils n'avaient pas grand'chose à faire. Rien à organiser. Pour une fois, c'était le pied. Se contenter de participer et de regarder, c'était bien plus reposant que de courir dans tous les sens à la recherche de quelqu'un ou d'un quelconque rouleau de papier...

N'ayant envie ni de participer au match de basket, ni à la compétition de base ball (elle était tout sauf adroite à ces jeux de balle), Koharu s'était naturellement dirigée vers la course de relais, un sourire bien accroché aux lèvres.

Elle aime courir. Ça lui permet de se défouler. D'oublier ses soucis. De faire le vide. La plupart ne comprennent pas vraiment. Mais bon, au fond, l'important c'est d'y trouver son compte. La course a fini par se terminer. Et son estomac par gargouiller.

- Koharu-chan !

Elle se fait interpeller alors qu'elle se dirigeait vers le bâtiment Meiji pour sortir son bentô du réfrigérateur mis à la disposition des élèves. Ce n'est pas vraiment de la grande cuisine, Koharu ne réussissant correctement que les omelettes. Mais bon, c'est toujours mieux que les bentôs des supermarché. Et puis c'est moins cher.

Alors qu'elle s'était arrêtée pour chercher qui l'avait appelée, sa mère la rejoint en pressant le pas. Un léger sourire sur les lèvres, elle lui tend un paquet.

- Tiens, je t'ai mis des samoussas. On va y aller, ton père et moi. Fais attention à toi Koharu.

D'abord un peu surprise, la jeune fille finit par saisir le paquet. Sa mère ne lui avait plus fait du bentô depuis son entrée à Ginkgo... Et pour tout dire, cela lui avait plutôt manqué. Après tout, sa mère était vraiment douée pour la cuisine. Remise de sa surprise, elle lui a avait adressé un sourire éclatant avant de la remercier chaleureusement et de lui dire au revoir. Ses infâmes onigiris qui s'écroulaient aller rester au frigo aujourd'hui !

La miss les avait raccompagné jusqu'à la sortie et, son bentô à la main, était partie s'asseoir sous un arbre, dans un coin du parc. La plupart de ses amies étaient avec leurs familles. Ce midi, elle mangerait donc seule...

- Euh.. Désolée, je peux manger avec toi ce midi ? Je suis Michiki Rena de la classe 2-A.

Ou pas, au final. Levant la tête, elle découvrit une fille aux longs cheveux. Cherchant rapidement dans sa mémoire, elle cru se souvenir qu'il s'agissait d'une des filles qui occupaient la chambre du bout du couloir. Mais bon, n'en étant pas sûre, elle n'allait pas lui demander confirmation... Lui adressant un sourire amical, elle se décala légèrement pour lui faire une place contre le tronc, et tapota l'herbe de sa main gauche.

- Je suis Fujiwara Koharu, de la 3-A. Assis-toi.

Elle la regarda prendre place sur l'herbe avant de sortir son bentô de l'emballage avec un regard gourmand. Soulevant le couvercle, elle découvrit les samoussas attendus, accompagnés par du riz basmati et du curry japonais. Qu'elle aimait sa mère à ce moment précis !

Séparant ses baguettes, elle lança un regard joyeux à sa camarade.

- Itadakimasu !!

«  Merci beaucoup, tu es très gentille. »

Lui dis-je tout en m'asseyant à l'endroit qu'elle m'avait indiqué. Je suis contente d'être tombée sur quelqu'un de gentil comme cela. C'est toujours à craindre quand on ne connait pas réellement la personne à qui on s'adresse. Enfin. Je suppose qu'il y a beaucoup moins de chances de tomber sur une personne malveillante et mauvaise dans notre lycée. Il est assez bien placé et bien réputé dans le pays pour ne pas attirer tous les rebelles du pays du soleil levant. C'est aussi pour cela que je l'avais choisi, parce que je tiens beaucoup à ma quiétude. J'aime beaucoup avoir ce sentiment de sécurité avec moi. Après tout, je quittais la maison de mon oncle et de ma tante pour la première fois depuis longtemps, alors le choix ne devait pas être pris à la légère. Je ne voulais pas d'une école en plein Tokyo par exemple. Il y a tellement de jeunes malfrats, de gangs et ce genre de choses, comme on peut le voir à la télévision dans des reportages, ou dans les magasines de mes cousins. Moi je préfère largement avoir confiance en les élèves que je ne connais pas vraiment encore. C'est ma deuxième année dans cette école et je dois bien avouer qu'il est rare de tomber sur une personne désagréable. Les élèves ici ont tous été bien éduqués, apparemment.

« Itadakimasu ! »

Répondis-je en lui lançant un petit sourire. Alors que je n'avais pas encore ouvert mon propre Bento, je me permis de regarder de quoi était composé le sien. Cela se faisait beaucoup de toute manière. Les lycéennes qui rentraient chez elles le soir, et qui devaient donc apporter leur repas le lendemain le faisaient souvent. Je l'avais même fait au collèges avec mes amies. Et si la propriétaire du bento l'autorisait, on pouvait gouter pour lui piquer quelques saveurs qui nous plaisaient particulièrement. Ce qu'avait Fujiwara-Sempai semblait fort appétissant et je doutais avoir le droit à quelque chose d'aussi élaboré. Je n'en voulais pas à ma tante, puisqu'elle avait du cuisiner pour une famille entière, elle n'allait pas commencer à cuisiner les mets les plus compliqués. Mon bento ouvert, je découvrais donc du riz simple, avec des omelettes roulés et du poulet fris. C'était bien suffisant. La volaille était une viande que j'appréciais beaucoup également. A sentir le riz, il avait été parfumé au thym. Ma tante aimait beaucoup rajouter de ces saveurs, et même si j'avais fais la grimace à mes débuts chez eux, je trouvais le goût fort appréciable maintenant.

« C'est ta mère qui a préparé ton bento ? »

La réponse semblait évidente, mais il fallait bien engagée la conversation. Ce qui était bien avec ce genre de journée, c'est que beaucoup des élèves pouvaient revoir leurs parents. J'essayais d'être distraite quant au fait que je vivais avec mon oncle et ma tante, mais je ne mentais pas si l'on me posait la question. Mais je ne racontais pas le reste. Jamais. Je n'avais pas envie de faire peur ou bien de passer une une fille pas banale. J'aimais bien ma banalité moi.

C'était à mon tour de délier mes baguettes pour commencer à manger. Tout de suite, je prie un morceau d'omelette roulée et coupée, parce que je réservais le poulet pour la toute fin. C'était ce que je préférais manger, alors je voulais pouvoir le savourer et garder ses saveurs en bouche, gourmande que je suis.