Aujourd’hui, la Voix a parlé à nouveau. Un frisson d’horreur m’a fait trembler de la tête aux pieds. Qui allait être la victime cette fois ? Aux regards inquiets que les autres élèves se lancent, je devine ne pas être le seul à me poser la question. Nous avions eu la paix, mais ça ne durera pas. Telle est la pensée qui s’agite dans nos têtes et un observateur, même peu attentif, remarquerait sans mal l’angoisse que cela provoque.

Malgré ça, malgré la peur qui dans nos ventres s’installe, nos pieds nous dirigent vers le gymnase. Que nous veulent donc les LP ? Pourquoi réapparaitre maintenant ? Pourquoi nous convoquer tous, d’urgence ? Pourquoi obéit-on ? C’est ce qui m’interroge. Nous, dociles petits élèves, nous faisons ce qu’ils attendent de nous. Est-ce la curiosité qui nous pousse vers la salle ? Je suppose.

Quand nous y sommes, c’est une surprise de taille qui nous y attend. Sur l’estrade montée à l’occasion d’une quelconque réunion à des gens extérieurs à l’école (il arrive que le gymnase soit prêté parfois), on peut voir un grand tableau avec des textes étranges dessus. Est-ce donc une plaisanterie ? Elle est moins méchante que les précédentes en tout cas, et ce sont des soupirs de soulagement qui envahissent maintenant l’espace entre les 4 murs…
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Consignes : La Voix (la voix du chef des LP) a invité tous les élèves à se rendre dans le gymnase. D’abord réticent puisque soupçonnant une autre blague, vous vous y rendez cependant. La foule se masse finalement dans le bâtiment, alors que des bruits courts dans les rangs. Sur les tableaux, on peut voir de grandes affiches « La mafia est dans l’école, méfiez-vous. » Plaisanterie ou affaire sérieuse ? Pourquoi les LP insistent tant là-dessus ? Y a-t-il un rapport avec le bal ? Ce sont les questions que tout le monde se pose…

J'aurais préféré ne rien entendre, mais c'était difficile de faire semblant de rien quand leurs voix résonnent dans toutes l'école. Leur invitation à se rendre au gymnase était presque un ordre. Que nous voulaient-ils encore ? Cela faisait un moment qu'ils ne s'étaient plus montrés. Même au bal, on ne sait toujours pas s'ils y sont pour quelque chose.

Quoi qu'il en soit, je me dirige tout de même vers le gymnase. Pourquoi ? Les LP nous ayant invités à nous y rendre, j'ai l'impression que le bâtiment exerce une attirance magnétique sur moi. Je ne résiste pas et mes pas m'entraînent. D'autres élèves se joignent à moi, nous sommes bientôt une foule (ou peut-être est-ce moi qui ai rejoint la foule ?). Nous nous demandons tous ce qui nous attend à l'intérieur du bâtiment. Les premiers élèves entrent mais aucun cri. Cela ne devait donc pas être si terrible.

J'entre à mon tour dans le bâtiment. Dans l'ensemble, la salle semblait normale. Elle était organisée comme lorsqu'elle servait aux réceptions extérieures. Finalement, mon regard est attiré vers les tableaux que l'on voit non loin de nous. Et ce que j'y lis m'intrigue au plus haut point. La mafia serait dans l'école ? Mais … pourquoi ? C'est totalement aberrant, absurde, ridicule ! Pourquoi ce groupement de tordus dangereux s'intéresserait à notre école ? Qu'est-ce qui pouvait les intéresser ?

Soudain, je stoppe net mes réflexions. C'est pourtant évident : ce n'est qu'une stupide plaisanterie des LP. Et une mauvaise plaisanterie. D'habitude, ils s'en sortaient bien. Au pire, ça nous agaçait mais ils n'avaient jamais cherché à créer un sentiment de panique chez les élèves. C'est pourquoi c'était évident : cette information était fausse.

- Vraiment n'importe quoi, marmonnais-je sans m'en rendre compte.

Je regarde autour de moi pour voir quelle réaction a créée cette mauvaise blague sur les autres élèves. Visiblement, beaucoup semblent partagés. Je soupirai. Peut-être qu'au final, ce n'était pas une blague … Subsiste alors la question de « Pourquoi la mafia serait-elle à l'école ? Et comment en reconnaître ses membres ? ».

Occupée à comprendre ses mathématiques, Miyu était concentrée sur les chiffres qui s'étalaient devant elle. Crayon à papier en main, gomme et règle à portée de doigts, elle faisait des essais, feuilletait des pages et raturait allègrement ses feuilles en se passant la main dans les cheveux. Sa lèvre inférieure, plus claire sur sa comparse lorsque les dents de la jeune fille la lâchait enfin, retrouva vite son rouge habituel. La rousse la mordilla à nouveau. Elle ne comprenait pas. Elle ne comprenait pas et le vacarme dans le haut parleur ne l'aidait pas. Trop concentrée sur sa tâche, elle ne fit même pas attention au fait qu'il s'agissait des LP. Il fallut les raclements de chaises contre le sol pour qu'elle percute enfin. La jeune fille se morigéna intérieurement. Comment elle, si dissipée habituellement, avait-elle pu rater le message ?

"Que se passe-t-il ?"
"Les LP. T'as pas entendu Chibawa-chan ?"
"Nope. Ca s'passe où ? Ils ont dit quoi ?"

On lui répéta à peu près les mots prononcés par la Voix alors qu'elle rangeait ses affaires. Tant pis pour l'algèbre. Elle préférait à ça une bonne blague des LP. Sourire aux lèvres, la demoiselle se mit en marche avec ses amis jusqu'au gymnase où la foule se massait déjà. Trop petite pour voir par-dessus les têtes, la première année se glissa entre les élèves jusqu'à arriver au premier rang où elle lut les affiches avec effarement. Elle avait imaginé beaucoup de choses, mais certainement pas ÇA !

"Oh purée !"

Mais qu'est-ce qu'ils avaient été inventés ? Pourquoi la mafia ? Le bal avait bien assez défrayé la chronique. On en parlait encore avec crainte dans les couloirs. Seuls les chuchotements étaient de mise pour évoquer le sujet, comme si le fait d'exprimer à voix haute la peur ressentie par les élèves allait la rendre plus vivace encore !

Pour la première fois depuis qu'elle avait mis les pieds dans l'école, la petite rousse ne trouvait pas la nouvelle plaisanterie des LP amusante. Les sourcils froncés, elle s'interrogeait même. Le non-sens de la farce était trop gros, les murmures autour d'elles trop présents. On s'inquiétait. On n'y croyait pas. On priait intérieurement. Et finalement, certains osaient émettre l'hypothèse que ça expliquait peut-être les évènements du bal. Miyu, elle, secoua la tête pour chasser les pensées qui s'y glissaient et emprunta le chemin vers la sortie. Vraiment, c'était n'importe quoi... Mais si c'était vrai ?

En d'autres circonstances, les exclamations de Hlyn ponctuant chacune de mes phrases m'auraient fait sourire, voir rire. Mais pour aujourd'hui, elles ne firent que tressaillirent légèrement le coin gauche de ma bouche sans que je ne m'en rende compte. Elle semblait trouver mes idées totalement … surprenantes avec sa manière de s'expliquer. J'en rougis quelque peu.

« Mouais, mouais, mouais... je ne sais pas trop. Le bal qui dérape... avec un mort à ce qu'on dit. Maintenant ça. Tu crois que c'est lié? Et puis, tu crois qu'il y a vraiment un quelqu'un de tué l'autre jour? Mais t'imagines si c'est vrai »

Je frissonnai. Non, je n'avais pas envie d'imaginer. Un mort dans une école... mon école ! Non ! Ces histoires n'arrivaient que dans les écoles des autres, celles qui étaient loin et qui ne faisaient que nourrir notre imaginaire. Celles des États-Unis voir de France mais … pas chez nous. Un mort … Oui, j'avais entendu la rumeur courir mais rien n'avait été confirmé. Ni infirmé. J'aurais préféré que le directeur s'explique mais évidemment, il n'était silencieux que quand on avait besoin de son avis. Stupide directeur !

Je n'écoutais plus Hlyn que d'une oreille tellement mon esprit tourbillonnait en tout sens mais je fus ramené à la réalité quand elle me secoua comme un prunier. Je la regardai surpris, mi-amusé mi-agacé par ses élucubrations fantasmagoriques (oh purée, comment je suis trop contente de l'avoir placée celle-là). Je repoussai ses bras avec douceur, un air un peu inquiet sur le visage.

- Hlyn, ton imagination surchauffe. Que ferait la mafia avec mon oreille ? Et puis qui s'en tracasserait de toute manière ? Tu ne crois pas que ce serait mieux de …

Non. Stop. Je m'emporte, je me laisse emporter par mon imagination tout aussi folle. Un petit toussotement et je reprends.

- Avant de parler de découpage d'oreille, il faudrait peut-être éclaircir ce problème de … mmh … « disparition » dirons-nous, car elle semble être un début intéressant sur lequel nous pouvons nous baser pour enquêter. A ce que je sache, le directeur ne s'est pas prononcé à ce sujet n'est-ce pas ?