| Sujet: Arrivée silencieuse. [Libre] Jeu 31 Jan - 21:01 | |
| Un claquement de porte soudain. Le son de talons résonnant sur le sol. Une veste soulevée par le vent. Un long souffle régulier sortant de la bouche d’une jeune femme. Tels étaient les sons qu’émettait Maeko Yui Wakiya en partant de chez elle pour partir dans une nouvelle école. Rien de cérémonieux, pas de larmes déversées. De toute façon, faire tout un mélo pour quitter sa maison, c’était inconcevable pour elle. Etant seule chez elle depuis l’embarquement de sa mère, il était difficile de faire autrement. Ce changement d’établissement ne lui faisait ni chaud ni froid. Elle n’était reliée qu’à quelques personnes qui se comptaient sur les doigts d’une seule main, sa mère ayant perdu sa garde. Indifférence, quand tu nous tiens, c’est tout notre être que tu envahis…
Ses mains vêtues de gants d’un cuir brillant noir, elles tenaient dans leurs fins doigts une cigarette tout aussi fine, à moitié entamée. Ses lèvres laissaient échapper un long souffle régulier, de couleur grisâtre. Ses longs cheveux de la même couleur que cette fumée flottaient sous le vent frais, sa frange ne bougeant pas d’un cil. Vêtue d’un tailleur noir avec des escarpins noirs avec un talon relativement petit sans oublier sa légendaire veste très longue noire avec intérieur blanc, elle restait à côté de l’arrêt de bus, debout. Pas un mot sortait de sa bouche, son regard restait inexpressif tout comme son visage. Mais son corps quant à lui donnait l’impression d’être détendu, très calme. Certaines personnes lui donneraient l’attitude d’un serial killer. D’autres préféreraient dire « qu’elle a la classe ». Il restait les gens les plus simples. Ceux qui ne disaient rien. Soudainement, Yui prit la valise fermement dans sa main. Un freinage se fit entendre. Le bus était là et l’emportait doucement vers la prochaine gare, sous le regard attentif du chauffeur.
Le voyage dans le bus passait très vite, ce qui était tout le contraire du voyage qu’elle avait à faire dans le Shinkansen. Une fois sortie du transport en commun, il lui fallait courir pour prendre le Shinkansen à temps. Ce qu’elle réussit à faire. Et c’est cinq minutes plus tard qu’elle finissait par trouver sa place. Et le train l’emportait loin, sous les yeux impuissants des quelques figurants… Le regard rivé sur la fenêtre, Maeko observait le paysage défiler devant ses yeux si rapidement que le discerner lui était parfois impossible. Mais ce n’était pas pour cette raison. Maeko subissait le sentiment que l’on nommait la « mélancolie ». Tous ses souvenirs lui réapparaissaient à travers cette vitre. Sa sortie de la maternelle. Les Ohanami avec sa famille. La fleur offerte par une de ses anciennes amies. La mort soudaine de son père. Son enterrement. Sa mère qui l’agressait. Sans oublier ses passages au collège et au lycée. Dans sa tête, tout s’entremêlait. Des dialogues arrivaient même à revenir, au mot près. Pour la première fois depuis longtemps, Maeko ressentait des émotions fortes.
Ce voyage qui n’avait duré qu’une heure lui avait semblé durer une éternité. C’est d’ailleurs les jambes flageolantes qu’elle sortait de ce train à grande vitesse, encore sous le choc de toutes ses émotions remontées en même temps. Après avoir fumé une énième cigarette, la jeune femme partait en direction de l’établissement. Mais au lieu de prendre le bus comme il était convenu de faire, elle prit la décision de faire le restant du chemin à pied, estimé à une demi-heure. Un peu de marche allait lui faire reprendre ses esprits. Le vent soufflait toujours aussi fort et la jeune femme ne pouvait empêcher ses cheveux de remonter, d’envahir son visage plus que ce qu’ils ne faisaient déjà. Sa valise toujours en main, il lui fallait s’arrêter quelques fois pour prendre sa valise dans son autre main comme tout être humain normal. Dans la ruelle où elle était engouffrée en ce moment, pas un seul son ne venait déranger ses oreilles, si ce n’est le son régulier de ses chaussures qui claquaient sur le sol de bitume. Et c’est après avoir traversé d’autres rues qu’elle finit par trouver l’entrée de l’école, une grande grille métallique avec le nom de l’école inscrit dessus. Quoi de plus original.
Maeko restait fixée quelques secondes devant cette grille et finit par la pousser pour découvrir ce qui s’offrait maintenant à ses yeux. Et bizarrement, Maeko ne trouvait pas un seul étudiant dans la cour de récréation qui s’offrait à ses yeux. Son regard se posait donc instinctivement sur la grande horloge. 9h25. En effet, les étudiants devaient sûrement être en cours. Profitant de cette occasion, la jeune femme s’offrit le plaisir de s’allumer une cigarette, assise sur un banc, son regard fixé vers le vide. Le son du silence parvenait délicatement à ses tympans, rien ne pouvait troubler sa sérénité. Si ce n’est le bruit de pas qu’elle entendait à présent. Alors après avoir expiré un long sillon de fumée, de ses lèvres sortait une phrase, sans aucune intonation particulière : « Le silence est la plus belle des musiques. Tu viens de troubler mon écoute en arrivant ainsi. Tant pis. » |
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| Sujet: Re: Arrivée silencieuse. [Libre] Mer 12 Mar - 8:37 | |
| Il faisait un froid de canard, la plupart des gens avaient cours, mais ça n'empêchait pas Akane d'être dehors. La classe 2A, elle, avait le bon goût de ne commencer les cours qu'à 11 heures du matin. Manque de bol, ça ne permettait pas pour autant aux malheureux internes de se lever plus tard, et la jeune fille n'avait pas eu la moindre envie d'aller s'enfermer dans une salle de permanence surchauffée, emplie de ses condisciples qui braillaient, grattaient du papier ou se faisaient du pied sous les tables. Et puis en général, aux premières heures du matin, les surveillants étaient moins regardants quand ils faisaient l'appel qu'en plein milieu de la journée. Pour ces multiples raisons, Akane bravait les rafales de vent de début février, un livre emprunté à la bibliothèque soigneusement planqué sous son manteau - il était hors de question qu'elle corne une seule page du précieux ouvrage prêté par Hikeru-san, ou bien, même dans sa grande gentillesse, il lui arracherait les yeux avec les dents. La cour semblait déserte, surtout pour l'adolescente qui, perdue dans ses pensées, avançait sans vraiment prêter attention à ce qui se passait autour d'elle.
Une voix s'éleva et Akane s'arrêta. Une fille assise sur un banc lui reprochait de troubler le silence rien que par ses pas. Non, en fait elle ne lui reprochait pas vraiment, sa voix était trop calme pour ça - surtout qu'elle n'avait vraiment pas l'air de l'énervée de base.
"Tu as l'oreille fine pour arriver à entendre le silence dans un vent pareil", furent les seuls mots qui vinrent aux lèvres d'Akane Shirase.
Un peu idiot. Elle espéra que la fille en face d'elle ne le prendrait pas mal. Ce n'était pas idéal comme entrée en matière. En fait, elle n'arrivait pas à associer un nom au visage de cette fille. Elle ne se souvenait même pas l'avoir déjà vue à l'école. Mais il n'y avait pas si longtemps, elle-même était nouvelle, et l'établissement était relativement prisé.
"Tu es nouvelle ici, non?"
Un courant d'air glacial s'engouffra sous son manteau et elle frissonna. |
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