Chiaki se séchait les cheveux, le regard dans le vide. Le vrombissement constant de l'engin l'aidait à faire abstraction de tout ce qui pouvait se passer autour d'elle, et elle réfléchissait. Est-ce qu'elle avait bien fait d'abandonner l'idée d'avoir les cheveux lisses et plats? Sûrement. Elle avait des cheveux rebelles et fiers de l'être, un passage maniaque à quatorze ans lui ayant permit de juger que passer une demi-heure à se lisser tous les matins était une perte de temps folle, alors qu'elle pouvait utiliser ce temps pour, par exemple, manger des gâteaux en regardant Death Note. Et s'extasier sur son L chéri... Ou alors pour embêter son chat en lui tirant les oreilles. Ou même, exceptionnellement, pour faire les devoirs qu'elle avait eu la flemme de terminer la veille. Bref tant de choses plus intéressantes que de faire la vache devant son miroir pendant une demi-heure. Elle soupira, rassembla une poignée de cheveux qui étaient emportés par le vent à chaque fois et ne séchaient jamais et se prit à penser au nouveau livre qu'elle avait commencé à écrire. Fallait-il vraiment attendre les cent pages, comme prévu, pour lancer la "séquence révélations"? Peut-être que oui, peut-être que non, puisque de toute façon celles-ci seraient incomplètes. Il manquait beaucoup de choses pour que ses personnages ballotés par ses caprices ne comprennent tout ce qui leur arrive et pourquoi. D'ailleurs elle-même avait pour principe de ne rien prévoir, puisque l'histoire finissait toujours par lui échapper. Tout lui échappait. Elle eut un vertige et fut contrainte de s'asseoir par terre pour ne pas défaillir. Son manque de sommeil récurent devenait de moins en moins supportable, les week-ends avaient beau être salvateurs en lui permettant de dormir jusqu'à tard dans la matinée, ça ne suffisait pas. Voir un psychologue ne lui servirait à rien, elle avait déjà essayé. Elle essaya de trouver un évènement qui avait pu la traumatiser... Toujours rien. Ses parents qui se disputaient? Non, ça n'arrivait pas si souvent. Sa sensibilité extrême aux changements d'ambiance? Non, aucun rapport. Son imagination bien trop débordante? Possible, mais elle en doutait. Et puis pourquoi n'y avait-il personne ici? Toute seule dans une salle pleine de miroirs, elle angoissait toujours. Car, comme elle l'avait expliqué à sa première psy (qui n'avait rien pu pour elle d'ailleurs), il y a un nombre incalculable de créatures qui sortent des miroirs ou en se reflètent pas dedans. Elle frissonna. Elle avait une forte envie de partir en courant, mais elle se retint en se disant que si elle réussissait à rester jusqu'à la fin, elle déballerait un des petits bavarois aux framboises que ses parents lui avaient envoyés (connaissant la sérieuse tendance de leur fille à manger au moins deux ou trois gâteaux par jours, ils l'approvisionnaient régulièrement). Et si elle ne réussissait pas, elle boirait un verre de lait. Vite, avec une bouteille de jus de citron à côté histoire de pouvoir changer de goût avant même de l'avoir senti, le lait la faisait vomir. Et tout ce qui touchait aux laitages la dégoûtait. Le verre de lait était une autopunition récurrente, ça l'empêchait de faire beaucoup de choses stupides. Pour le coup, partir en courant en abandonnant son sèche-cheveux et sa dignité ne lui paraissait pas très intelligent. D'un coup, elle pensa à un lapin dans un pneu. Puis elle imagina un livre avec une bouche et des yeux en train de convaincre une foule d'admirateurs que les oranges étaient vertes. Il était vraiment temps qu'elle dorme. Ce genre de visions lui arrivaient seulement quand elle était complètement crevée. Elle se promit de prendre un calmant anti-stress avant de se coucher, ce soir.
Elle se remit à fixer devant elle d'un air vide et s'efforça de ne penser à rien.

Le matin, c'est la zone.

C'est naze, c'est nul, c'est un temps à retourner se coucher. C'est tout ce qui ce qui est capable de passer dans l'esprit d'Elza du moment où elle ouvre les yeux la tête dans l'oreiller, jusqu'au moment où elle parvient à s'effondrer dans la douche la plus proche, et à y comater sous l'eau chaude.

Jusqu'au moment où elle prend son courage à deux mains, et tourne violemment le robinet sur la position eau froide.

-Gwaaaaaah !

C'est le meilleur moyen qu'elle a trouvé pour se réveiller, comme tous les matins, depuis qu'Elza est Elza.

Une minute... Cinq minutes... Un quart d'heure... L'eau froide coule dans sa nuque, explore sa peau, glisse sur ses cuisses, avant de se perdre sur le sol où une Elza, recroquevillée dans un coin de la cabine de douche, s'amuse à dessiner des formes avec ses doigts. Et puis finalement elle en a marre. Après vingt minutes à laisser l'eau couler, elle l'éteint, ramasse son pyjama mouillé qui traine par terre et retourne à sa chambre, humide et à poil, sans rencontrer personne. Dans sa chambre non plus, personne n'est encore rentré de vacances. Elle pose sans vraiment l'étendre son pyjama sur le radiateur (froid, mais ce n'est qu'un détail) et fouille son armoire en désordre jusqu'à en extraire une serviette. Elle s'essuie rapidement et, les cheveux encore trempés, attrape les premières fringues qui lui tombent sous la main. En l’occurrence une jupe longue blanche tout ce qu'il y a de plus classique et un débardeur vert pomme. Le comble de l'élégance et de la discrétion. Comme d'hab', quoi.

Sur ces entrefaites, et maintenant qu'elle a quelque chose sur le dos, elle attrape un sèche-cheveux qui trainait sur sa table, un peigne, une petite serviette sèche pour éponger sans trop y croire sa chevelure couleur bonbon et se dirige d'un air absent vers la salle de bains, encore elle, pour finir ses ablutions matinales par un bon jet d'air chaud en pleine tronche.

Une fois la porte de la pièce écartée de son chemin, c'est à peine si elle note la présence de quelqu'un sur les lieux. Elle se dirige directement vers les lavabos, et plus précisément sur le seul qui soit équipé de, outre un miroir, une prise électrique. Prise électrique utilisée, par ailleurs. Ce qui arrache à peine un haussement de sourcils à la demoiselle qui prestement libère la place pour commencer à s'occuper de ses cheveux. Hein, si elle a remarqué Chiaki, assise à moins d'un mètre d'elle ? Oh oui, sûrement. Peut-être. Mais la voir ne suffit pas à l'intégrer à son univers interne. Et certainement pas à lui accorder plus d'importance qu'à un meuble, dans son univers interne. C'est donc avec une intense satisfaction qu'Elza s'arrose le visage d'une bonne dose d'air chaud et sec, faisant voler cheveux roses et cheveux noirs derrière ses oreilles, promesse d'un démêlage aussi long que fastidieux. Mais bon, pour Elza, c'est comme le reste : elle en a rien à foutre. Normal quoi.

[Si problème, MP =]]

Chiaki ne se rendit pas compte tout de suite que son sèche-cheveux s'était arrêté. Elle n'avait pas noté la présence d'une autre personne et puisque le bruit continuait, elle ne s'en souciait pas, perdue dans les méandres de son esprit. Lorsqu'elle en sortit, ne sentant plus d'air arriver sur elle, elle regarda vers la prise. Son sèche-cheveux avait été retiré, et un autre avait pris sa place. Son cerveau peinant à faire toutes les connections (dans le pâté? Noooon), elle mit un certain temps à se dire que si autre chose était branché sur la prise, c'est qu'il y avait quelqu'un d'autre. Elle tourné la tête et vit une fille avec des cheveux flashy, qui ne faisait absolument pas attention à elle.

Chiaki avait hâte de terminer, puisqu'elle n'aimait pas gêner les gens, en plus, n'ayant pas prit de quoi se changer, elle était toujours en pyjama (bleu électrique avec des lapins qui font de l'auto-tamponeuse), et elle voulait retrouver ses chères New Rock (ses chaussures quoi) le plus vite possible. Et elle commençait à avoir faim, comme toujours, un peu plus d'une heure après s'être réveillée. Il fallait encore qu'elle téléphone à ses parents pour leur donner des nouvelles... Ils allaient s'inquiéter si elle attendait trop, parents-poules qu'ils étaient. Elle se tâta les cheveux. Pas secs. Bon, tant pis. Elle pesa le pour et le contre, pour savoir si elle devait s'écouter ou pas. Elle commença par se coiffer, puis alla s'habiller, pour laisser un peu de temps (pas plus de trois minutes, mais c'est déjà ça) à l'autre.

Elle courut dans le couloir pour être sûre que personne ne la voit dans ce pyjama "de relâche" et, une fois dans sa chambre, elle mit une jupe à volants violette et des colants violets et noirs à carreaux écossais, avec un T-shirt noir marqué d'un grand "L" blanc. Bon, ça faisait otaku. Tant pis, elle ne comptait pas se balader partout aujourd'hui, plutôt se planter quelque part et ne plus en bouger. Dans la salle commune avec un bouquin par exemple.

Elle retourna vite dans la salle de bain. Bon, sa sempai était toujours là. Soit. À son tour, elle débrancha le sèche-cheveux de l'autre pour rebrancher le sien, et marmonna.

"Désolée, j'ai presque fini."

Bon, pas sûr que ça plaise à la nouvelle arrivante mais tant pis, après tout, elle était là avant. Au pire, ça finirait sur une petite altercation, avec un "les aînés ont toujours raison" et elle irait dans le parc pour laisser le vent finir le travail. Vu la façon dont Chiaki avait été éjectée de la prise, elle doutait que sa sempai se formalise beaucoup si elle faisait de même. Et si c'était le cas, alors elle serait classée dans les personnes à éviter qui croient que tout leur est dû, puis on en resterait là. Rien de grave ne pouvait arriver à cause d'un problème de prise, enfin sauf si la prise en question explosait ou que, suite à une défaillance technique, il y ait une fuite et que toute l'eau de la pièce soit électrisée. Peu de chances que ça arrive.

Elle ferme les yeux. Le vent s'engouffre dans ses narines, ses cheveux, tous les replis de son visage. Lui font oublier un bref instant le froid, la solitude, l'endroit où elle se trouve... Elle reste ainsi, quelques minutes, ailleurs... Et puis, il faut bien les sécher ces cheveux. Prendre un peu soin de leur belle couleur rose. Elle rouvre donc les yeux se contemple un instant dans le miroir, sceptique, et commence à orienter le sèche-cheveux de façon à ce qu'il remplisse son office. Pendant ce temps là, Elza observe Elza. Les yeux encore bouffis. Le T-shirt humide de sa douche mal séchée. Un vernis à ongle de couleur aléatoire s'écaillant sans qu'elle y prenne garde. Du bleu, du vert... Tout à l'heure, elle couvrira tout ça de blanc. Comme ça elle sera entièrement propre. Une bonne façon de commencer la journée, en somme.

-pviuuuu-

Elza contemple stupidement l'appareil quelques secondes, le secoue un peu, se demandant ce qu'il a à s'arrêter d'un coup. Elle appuie sur le bouton marche, une fois, deux fois, rien. Son regard suit le fil, tombe sur la prise mâle ballante, le long du lavabo, et sur l'autre fil qui occupe sa prise. Elle remonte le fil, voit un appareil similaire au sien, et finalement croise un inattendu regard humain. Chiaki vient d'entrer dans son univers personnel.

-Hey !!

C'est la première chose qui lui vient. Manifester son mécontentement. Oui, parce que merde, elle la gêne la nana là ! Mais un "hey" ne suffit pas à voir ses désirs devenir des actes. Avant de simplement débrancher l'appareil inopportun et de récupérer son "bien", elle tente tout de même une approche plus socialement correcte, tout en se demandant si c'est bien socialement correct de venir s'incruster sur une prise "publique" déjà occupée. Elle n'en est plus trop sûre.

-Tu me gênes, j'ai besoin de la prise !

Elza n'est pas bête, elle peut réfléchir. Mais elle est simplement devenue horriblement impulsive. Un élément perturbateur est apparu, elle exprime sa pensée, le plus purement du monde. Et si cela ne suffit pas à retrouver son fragile équilibre, alors seulement la réflexion viendra restreindre ses paroles, la doter de ce masque que chacun porte, cette chose dont elle veut à tout prix se débarrasser. Conventions. Ne serait-ce pas plus simple de simplement la virer d'ici ? Oui, mais pas plus efficace, tu es faible Elza, n'importe qui peut te mettre à terre et mettre fin à ton rêve. Concessions. Tu as accepté d'en faire. Ce n'est que la première et ne sera pas la dernière. Allez Elza, fais un effort, essaie d'argumenter avant d'utiliser la force.

En attendant de savoir si cela suffit pour que l'inconnue, la perturbatrice, quitte son univers clos, elle pose une main sur l'émail du lavabo, et cherche à planter ses yeux sombres dans ceux de l'autre. Elza cherche le regard. Elza veut regarder les autres dans les yeux, pour savoir à qui elle parle. Sinon, l'autre n'est rien de plus qu'une ombre...

Ah tiens. Elle réagit de la même façon que Chiaki avant elle. Elle met un temps à se rendre compte de ce qui arrive, paraît douter de la fiabilité de son appareil, et remonte le long du fil jusqu'à la prise, pour voir son engin débranché. Puis elle tourne la tête. S'exclame. Et hésite un peu, laissant un blanc le temps de réfléchir un peu. Exprime son mécontentement. Ah, elle en a besoin. C'est pas la seule.

« Je m'en doute, mais moi aussi. J'en ai pour cinq minutes. »

Elle a l'air d'hésiter, en proie à un conflit intérieur. Elle la regarde tour à tour avec une lueur meurtrière, puis plus calme. Chiaki devine bien son dilemme ; discuter ou frapper? Plutôt basique. Finalement, elle cherche son regard, la fixe pendant un long moment. Chiaki commence à se poser des questions. Elle agit assez... Bizarrement, tout de même. Après tout, elle peut bien lui laisser utiliser la prise, dans le parc, c'est aussi bien... Non, non, si elle recommence à céder à n'importe quoi ici ça promet pour l'avenir. Elle doit être moins faible et imposer, dans les limites du raisonnable, son point de vue.

« Et puis, bon, j'étais là avant... »

C'est bon, elle a protesté. Faiblement, d'un ton pas très convaincu, mais elle l'a fait. Après, c'est pas forcément une super idée, mais pour l'instant elle s'en fiche. Elle l'a fait. Elle guette sa réaction, légèrement inquiète. Est-ce que le problème se réglera vite et facilement? C'est vrai, elle n'en a pas tant besoin...

« Mais enfin, si tu y tiens tant que ça, je peux te laisser, le vent de dehors sera pas trop mal pour finir et j'ai surtout les cheveux humides... »

Raaah non! Elle a recommencé. Son espèce de gentillesse étrange qui se manifeste juste parce qu'elle ne veut avoir d'ennuis avec personne. C'est vrai, des ennemis, c'est plus encombrant qu'autre chose. Ça fait des gens à éviter, et réduit donc le nombre d'endroit où on peut aller. Pas pratique. Inutile, futile, ça fait des prises de tête pour pas grand chose. Après tout, autant se montrer conciliante au début, on peut se permettre d'être vache avec quelqu'un qu'on connaît bien. En même temps, avoir autant de personnalité qu'un tapis de bain ne la tente pas trop. Allez, un peu de courage.

« Hum. Mais j'ai vraiment presque fini, donc si tu veux bien attendre quelques minutes, sempai... »

Voilà. C'est mieux, un mélange de gentillesse et de protestation. Un peu des deux, ça passera.

Je m'en doute, je m'en doute... Mais moi aussi j'm'en doute que j'veux me sécher les cheveux ! Attends ton tour grognasse ! vocifère en pensée Elza, avec la subtilité et l'empathie qui la caractérisent. Peut-être que si elle avait réellement remarqué la présence de Chiaki lorsqu'elle s'était emparée de la prise, elle aurait eu une réaction différence, mais là tout ce qu'elle voyait c'était une enquiquineuse qui l'empêchait de tourner en rond. C'est trop demander peut-être de se sécher les cheveux tranquillement ? Oui, sûrement, puisqu'elle allait devoir se battre (verbalement. du moins, en principe.) pour arriver à ses fins. J'vous jure, la collectivité blah blah... que des emmerdes.

-Et puis, bon, j'étais là avant...
-Hein ? Bien sûr que non ! T'y vois pas clair ?

Bon maintenant ça suffit, Elza en a assez. La patience et la modération, elle connait pas, et entend bien arriver rapidement à ses fins !

-Mais enfin, si tu y tiens tant que ça, je peux te laisser, le vent de dehors sera pas trop mal pour finir et j'ai surtout les cheveux humides...

La réplique l'arrête avant qu'elle ait fait un geste pour arracher brutalement l'appareil de l'inconnue de sa prise électrique. Elle ouvre la bouche pour balancer quelque chose du genre « C'est ça fais comme ça et n'y revient pas ! » mais rien ne sort spontanément. Et avant qu'elle ait pu réfléchir d'avantage à comment lui expliquer que oui, elle y tient tant que ça, et qu'elle peut aller se faire foutre, l'autre reprend -encore- la parole.

- Hum. Mais j'ai vraiment presque fini, donc si tu veux bien attendre quelques minutes, sempai...

... Euh, okaaaay, mais elle veut quoi au juste celle-là ? Quelques minutes ? C'est pas trop... Hé oh, Elza tu fais quoi là ? Tu veux cette prise, prends-là. Rien à foutre. C'est bien ça ta volonté... n'est-ce pas ?

-Et alors ? Essaie au moins d'être sûre de toi si tu veux quelque chose, crétine !

Et sur ces mots, elle arrache sans vergogne l'appareil de la prise, et balance le fil dans les mains de la jeune fille. Elle attache un instant son regard au fond des yeux de l'inconnue... Puis s'en retourne à la prise, rebranche son appareil et éjecte aussitôt Chiaki du champ de ses préoccupations. Elle ferme les yeux et appuie sur le bouton de mise en route. Clic. Clic clic.

...

This. is. A FAIL.

Elza rouvre les yeux, médusée, et appuie encore 4 ou 5 fois, débranche et rebranche l'appareil avant de se rendre à l'évidence : H.S. Alors la solution la plus simple apparait à ses yeux : emprunter celui de l'autre fille.

... Elle ne pensait pas avoir besoin d'elle...

Elle se tourne lentement vers elle, pâlit légèrement, les yeux toujours écarquillés, se demandant comment faire pour racheter son attitude. Si elle avait su qu'elle aurait besoin d'elle, alors elle se serait autrement comportée, bien entendu. Elle sait faire des concessions par intérêt. Elle réalise alors qu'il y a quelque chose qu'elle n'avait pas prévu dans ses plans. L'imprévu, précisément. Alors elle reste face à Chiaki, penaude, sans savoir quoi dire. Muette. Et finalement, tout ce qu'elle trouve à faire, c'est débrancher lentement son sèche-cheveux.

-Apparemment... J'en ai plus besoin...

Voilà, c'était le fail du matin. Youpi.

[Excuse le temps de réponse, pas énormément de temps en ce moment ^^" Je vais essayer de pas te faire patienter plus que ça.]

Eh ben... Pas super aimable. La preuve que faire des efforts ne paye pas toujours. Et dire qu'elle a tant de mal à parler aux autres.

-Et alors ? Essaie au moins d'être sûre de toi si tu veux quelque chose, crétine !
-Trop aimable.

Ah tiens. Elle débranche encore son sèche-cheveux. Génial. Chiaki rattrape de peu le fil qu'elle lui lance. Sa sempai appuie sur le bouton. Oh, la justice existe, son engin est pété. Bien fait... Bien fait... Bien fait... Et maintenant, Kana la regarde d'un air coupable. Bah oui ma vieille, tu l'es, coupable. T'avais qu'à faire un effort. Avec un sourire triomphant, elle se branche et, pendant une minute, se sèche les cheveux sans faire plus attention à l'autre. Mais bon, une fois qu'elle a eu ce qu'elle voulait, c'est-à-dire être sèche, elle ne voit plus de raison d'être désagréable. Après tout, ça arrive à tout le monde d'être de mauvais poil. N'importe qui peut être insupportable le matin en se levant. Allez, c'est l'heure de la bonne action du jour. Tentative de socialisation numéro deux. Courage, ça peut pas être pire que la première.

-Bah voilà, j'ai fini. C'était pas si long quand même. Tu le veux?

Et elle le lui tend. Trêve? Demande son regard. Elle ne sait pas encore comment l'autre va le prendre, si elle va considérer ça uniquement comme de la moquerie ou pas. Mais sérieusement, faudrait être un saint pour se montrer adorable après leur discussion. Elle a bien le droit d'être un minimum acide, quoi qu'on en dise. Les joies de l'internat ne sont pas toujours apparentes...

-Sans blague, la cohabitation, quelle connerie...

Et zuuuut, elle a encore pensé à voix haute.

-Oh, pardon. C'est sorti tout seul. En plus je devrais pas dire ça, c'est moi qui ai voulu habiter ici. Le fatigue mène à tout, je suppose. Et maintenant je monologue. De mieux en mieux. Tout ça me fait penser que je devrais aller m'acheter un ou deux trucs. Genre du somnifère... Ah je me demande si...

Décidément, elle ne peut pas s'en empêcher. Mais elle trouve ça tellement agréable de dire tout ce qui lui passe par la tête à quelqu'un qu'elle a tendance à énerver tout le monde. Elle fixe Kana avec les yeux écarquillés, prête à se faire rabrouer encore une fois. Elle cherche un signe de ce qui va suivre sur son visage, pour savoir si elle doit se préparer à une lutte verbale ou pas. Enfin, peut-être aura-t-elle de meilleures dispositions que tout à l'heure, après tout Chiaki n'a vraiment pas été rancunière.


[Pas de problème, moi c'est plutôt l'inspiration qui me manque en ce moment...]

Elza s'est assise sur le petit radiateur, à côté du lavabo, et Elza se morfond. Finalement, il faut se rendre à l'évidence, être poli avec n'importe qui peut porter ses fruits. Mais faire des concessions avec tout le monde dans l'éventualité où le hasard rende la chose utile ? Non, c'était trop demander... Elza n'y céderait pas. Liberté, liberté, où es-tu mon adorée... Nulle part, dans un songe, dans une pensée diaphane, qui jamais ne prendra corps Elza...

Elle laisse aller ses pensées, tripote ses cheveux humides, se rend compte qu'à vrai dire ils sont déjà secs, mais que le plaisir de sentir le vent balayer son visage lui avait fait oublier le reste. Elle secoue ses cheveux, essaie de leur donner un peu de volume, et ils retombent comme un cadre rigide autour de son visage. Bah... C'est aussi un style...

-Bah voilà, j'ai fini. C'était pas si long quand même. Tu le veux?

Tirée de sa rêverie elle lève ses grands yeux sombres vers ceux de l'inconnue, et plante son regard dans le sien, comme à chaque fois qu'elle veut établir une communication. Une drôle de manie, au fond.

-Bah euh... Ils ont séché en fait...

Elle ne pouvait plus vraiment se montrer odieuse en toute impunité, alors que le destin lui avait fait à l'instant un pied-de-nez mémorable. Et puis, la demoiselle s'était montrée cool avec elle, et même si Elza déteste la convention qui veut qu'on se sente redevable pour le moindre sourire donné, elle ressent l'envie d'être aimable avec cette jeune fille, pour une fois. Qui sait, le destin pourrait encore lui jouer un tour similaire.

-Sans blague, la cohabitation, quelle connerie... Oh, pardon. C'est sorti tout seul. En plus je devrais pas dire ça, c'est moi qui ai voulu habiter ici. Le fatigue mène à tout, je suppose. Et maintenant je monologue. De mieux en mieux. Tout ça me fait penser que je devrais aller m'acheter un ou deux trucs. Genre du somnifère... Ah je me demande si...

Elza se tait, écoute l'autre, observe cette fenêtre sur ses pensées avec une certaine fascination. Elza a toujours été curieuse de l'autre, même en n'étant que Kana. Et l'autre ? Elle semble guetter sa réaction. Comme si elle avait fait quelque chose d'incorrect... Ah, oui. Effectivement, il semble que ce qu'elle ait dit soit considéré comme incorrect. Mais moi j'm'en fous en fait.

-... Tu finis pas ta phrase ? T'sais, c'est pas parce que c'est pas une mentalité de bien-pensant qu'il faut renier ce que tu penses. La cohabitation, c'est bien l'une des plus belles conneries inévitables de notre foutue espèce

Sur ces mots, elle se relève. Est-elle en train de la juger ? ... Peut-être, ouais. Mais bon, elle n'allait pas non plus commencer à brider ses propres pensées.

-Merci quand même pour le sèche-cheveux.

Sans un regard elle jette son appareil inutilisable dans la plus proche poubelle, sans chercher à en savoir plus sur le pourquoi du comment. Elle se dirige vers la sortie, soudain tout se trouble.

Elle vacille.

Elle s'accroche à un lavabo, porte une main à son front, ferme les yeux, essaie de retrouver son équilibre.

-Merde.

La première chose qui lui passe par la tête : hypoglycémie. Maintenant qu'elle y pense, elle n'est plus très sûre d'avoir mangé quelque chose la veille. Ça lui arrive d'oublier un repas. Apparemment, mieux vaudrait qu'elle se jette rapidement sur un petit dej. Mais pour l'instant, reprendre ses esprits. Ce serait quand même con de s'écrouler au milieu du couloir. Très con, même.

[Pas trouvé de meilleure idée, sinon Elza se serait barrée. Si t'as une idée pour la suite du topic je suis preneuse ! :/ ]

-Bah euh... Ils ont séché en fait...
-Oh... Ben... Tant pis.

Mince, son beau geste tombait un peu à l'eau. M'enfin, c'est l'intention qui compte non? Et Kana avait l'air d'être nettement plus hésitante que tout à l'heure. Elle se sentait sûrement coupable et cherchait comment se rendre un peu moins désagréable... Non?

-... Tu finis pas ta phrase ? T'sais, c'est pas parce que c'est pas une mentalité de bien-pensant qu'il faut renier ce que tu penses. La cohabitation, c'est bien l'une des plus belles conneries inévitables de notre foutue espèce
-Oh, la fin n'était pas très intéressante, je me disais juste que j’allais devoir aller en ville cet après-midi. Oui, une connerie inévitable... On peut pas se supporter et on peut pas non plus supporter d'être seul. C'est mal foutu.

Et voilà, elle a encore laissé cours à ses pensées les moins agréables pour le genre humain. Mais elle ne peut pas s'empêcher de n'avoir aucune confiance en l'espèce dont elle faisait partie, avec des sentiments tellement éphémères. Un jour on s'aime, l'autre on se déteste, et tout ça pour rien ou presque. On est amis, on change d'ami et on se retrouve avec un ennemi. On vole, on tue, pour que tout nous arrange. Au fond on est tout égoïstes parce qu'on a été écrit comme ça.

-Merci quand même pour le sèche-cheveux.
-Oh, de rien...

Kana s'était levée et se dirige vers la sortie. Elle jette son sèche-cheveux sans plus de cérémonie.
Puis elle vacille et se rattrape de justesse au lavabo.

-Merde.
-Tu peux le dire...

Sûrement une crise d’hypoglycémie. Chiaki ne panique pas, elle a l'habitude. Cela lui arrive très souvent, et elle se balade toujours avec une boîte de bonbons sur elle. Elle en tend un à Kana.

-T'aimes les bonbons à la pomme? Faudrait peut-être que tu restes ici un moment. J'en ai d'autres, deux ou trois et tu pourras marcher sans problème. Enfin, si ça te gêne pas de rester dans une salle de bain avec une fille que tu connais pas. Et si t'aimes pas, j'en ai d'autres.

Chiaki s'assied entre deux lavabos et balance ses jambes dans le vide. Elle dépose la boîte de bonbons devant Kana et attend qu'elle bouge. (Pas la boîte, hein. Kana.) Elle se met à chantonner et se dit que oui, la cohabitation est indispensable. Chiant mais pratique.


[Désolée du temps de réponse, cette semaine a été vraiment dure... Pas d'idée particulière pour la suite, Chiaki peut dessiner des lamas sur la buée des miroirs, mais après...^^]

-Merde
-Tu peux le dire...
-Va te faire... Oh. Merci.

Pourquoi faut-il toujours qu'elle se sente agressée ? Elle voit l'offrande de Chiaki, et comprend qu'elle a fait une erreur. Ça la perturbe. Elle ne comprend pas l'autre. Elle ne lui a rien donné, elle a tenté de lui prendre même, et pourtant cette jeune fille est gentille, cette jeune fille lui donne sans conditions. C'est... curieux.

Vieux réflexe social, de ceux qu'elle cherche à chasser, mais qui refait surface après de longues années de conditionnement social. Elle se sent redevable, et se demande comment la remercier. Alors, pour commencer, elle prend un bonbon. C'est un bon début, oui.

-T'aimes les bonbons à la pomme? Faudrait peut-être que tu restes ici un moment. J'en ai d'autres, deux ou trois et tu pourras marcher sans problème. Enfin, si ça te gêne pas de rester dans une salle de bain avec une fille que tu connais pas. Et si t'aimes pas, j'en ai d'autres.
-Euh... non. Merci.

Le bonbon roule entre ses doigts fins, et finit au fond de sa bouche. Elle en inspecte le gout sucré quelques secondes, avant de l'avaler tout rond. Et d'observer le fond du regard de l'autre. Encore et encore. Elle a changé sa position interne. Elle a envie de faire un effort social pour cette fille. Mais lequel... hum...

-Je m'appelle Elza. Et toi ?

Attention. Là, Chiaki est réellement passée au stade de privilégiée. Voyons si ça va durer...

[DESOLEE pour l'attente, j'ai vraiment pas beaucoup de temps en ce moment >_< Et puis, Elza a trouvé quelque chose à "faire" de son côté, j'espère que Chiaki en fera autant :/ ]